Datacenters : comment Cap DC devient incontournable en Afrique

La société d'ingénierie girondine Cap Ingelec a créé il y a deux ans Cap DC, une marque lui permettant de déployer à l'international ses compétences en matière de conception et réalisation de datacenters. Directeur général de Cap DC, Olivier Labbé fait le point sur sa stratégie et évoque plus largement l'économie numérique en Afrique, prédisant de grands bouleversements.
Olivier Labbé, directeur général de Cap DC, spécialisé dans la conception et la construction de datacenters

L'Afrique, continent forcément en retard sur le numérique et ses usages ? Olivier Labbé balaie cette idée reçue d'un revers de main. Le directeur général de Cap DC se montre intarissable dès qu'on lui parle du sujet.

"Quand j'avais 25 ans la Chine était un pays en voie de développement. On voit le chemin parcouru en 25 petites années ! Les promesses sont grandes pour l'Afrique. Tout retard technologique finit par se traduire par de l'innovation, notamment dans le numérique. Tous les jeunes Africains sont nés avec le téléphone mobile. Et aujourd'hui plusieurs pays africains sont leaders mondiaux sur le paiement mobile, justement parce que les infrastructures bancaires que nous connaissons ailleurs ne s'y sont jamais vraiment développé. L'Afrique est à la dernière étape avant de passer à la reverse innovation : bientôt elle ne se contentera plus d'adapter des idées développées ailleurs, c'est elle qui créera des innovations qui seront utilisées ensuite par les pays développés."

Olivier Labbé voit plus précisément plusieurs secteurs susceptibles d'être des moteurs :

"La e-santé, où beaucoup de progrès peuvent être faits quand on voit que dans certains pays d'Afrique subsaharienne, on ne compte qu'un médecin spécialiste par million d'habitants. L'agriculture, où beaucoup est à faire. La e-citoyenneté également : en France vous pouvez commander un extrait d'acte de naissance en ligne et le recevoir rapidement, on est encore loin de ces services en Afrique."

Des tuyaux et des datacenters

Pour que ces innovations puissent se développer, encore faut-il que les infrastructures soient au rendez-vous. C'est justement le rôle de Cap DC. "Il faut deux choses : des tuyaux, qui sont là notamment sur les pays côtiers, et les datacenters où beaucoup reste à faire", résume à grands traits Olivier Labbé. Il y a deux ans, la société d'ingénierie Cap Ingelec, fondée par Jean-Paul Calès, décidait donc de s'appuyer sur une de ses spécialités, la conception et la réalisation de datacenters, et de la développer à l'international. Pas n'importe comment : en s'appuyant sur des partenaires locaux.

"Nous avons démarré en 2015 le déploiement de joints-ventures en Europe du Sud et en Afrique sous la marque Cap DC, précise Olivier Labbé. Cette stratégie partenariale répond à plusieurs enjeux. Elle nous permet de nous appuyer sur des compétences bien au fait des réglementations légales en vigueur et d'avoir un avantage compétitif lors des appels d'offre avec une main d'œuvre moins onéreuse. Notre maison-mère Cap Ingelec apporte de son côté son expertise pointue en ingénierie."

Se marier avec un partenaire local permet-il aussi de gagner plus facilement des appels d'offre ? "En théorie oui mais j'ai plusieurs contre-exemples à vous citer. Une partie de la classe économique africaine considère encore malheureusement que le prestige français est supérieur à la compétence locale", déplore Olivier Labbé.

8 filiales en 2 ans

Défenseur du co-développement, Cap DC cible plus particulièrement les pays d'Europe du Sud, où les infrastructures sont encore peu développées, et les pays africains francophones.

"Historiquement, les Anglo-saxons sont en avance sur le sujet des datacenters, décrypte Olivier Labbé. Mais ils ont tendance à se focaliser sur leurs marchés, sur leur monde, et délaisser le reste. De notre côté nous visons des zones où les normes françaises sont en vigueur, l'Afrique francophone est parfaite pour cela."

Le terrain de jeu est vaste, l'Afrique totalisant 17 % de la population mondiale mais un maigre 1 % des datacenters dans le monde. A ce jour Cap DC a créé 8 joint-ventures de ce type (à Rabat, Dakar, Accra, Alger, Douala...) et pris pour 1 million d'euros de commandes l'an passé. Olivier Labbé vise les 9 ou 10 filiales d'ici la fin de l'année avant de stabiliser temporairement ce chiffre. Pour le directeur général de Cap DC, l'avenir s'annonce structuré autour de trois types de datacenters :

"Il y a cinq ans, on imaginait des mégas data centers tous installés dans les pays nordiques, où il est plus facile et moins onéreux de les refroidir, explique-t-il. Depuis cette idée a beaucoup évolué. Aujourd'hui la vision repose sur ces mégas datacenters, sur d'autres régionaux, à l'échelle des grandes régions du monde, et d'autres enfin au plus proche des besoins et intégrés à l'urbain. Ces derniers répondent à deux problématiques : celle de la localisation des données quand elles sont sensibles, par exemple les données monétaires, et donc de la législation dont elles dépendent, mais aussi du temps de latence. Pourquoi Marseille devient un lieu très prisé pour ces infrastructures ? Parce qu'elle fait face à la zone Europe du Sud et Afrique et qu'entre Paris et Marseille, on gagne une milliseconde. Pour certains sujets, ce n'est pas important mais pour d'autres comme le trading, l'internet des objets, la voiture autonome, c'est crucial."

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