Cancer et travail : un enjeu pour le salarié, l’entreprise et la société

Cancer@work organise demain jeudi à Bordeaux un job dating un peu particulier. Il permettra à des malades du cancer de rencontrer des DRH d’entreprises. Organiser de tels événements est l’une des missions de l’association d’entreprises Cancer@work, créée en 2012. Elle a un objectif : mobiliser et engager les dirigeants dans une démarche volontariste d’intégration et de maintien dans l’emploi des salariés confrontés à la maladie.
C'est la deuxième fois que Cancer@work organise à Bordeaux un job dating permettant de faire se rencontrer des personnes touchées par le cancer et des DRH d'entreprises.

"Chaque jour en France, près de 1.000 personnes apprennent qu'elles ont un cancer, parmi elles 400 travaillent. Le cancer n'est plus seulement une question de santé, mais bien une affaire de société, qui impacte également la sphère professionnelle."

Anne-Sophie Tuszynski, elle-même touchée par cancer en 2011, a créé dès 2012 en région parisienne une association d'entreprises, Cancer@Work, pour proposer aux dirigeants d'entreprises un challenge : intégrer la maladie dans leurs entreprises pour et avec leurs salariés. "Elle a été une des premières à associer cancer et travail" reconnait pour sa part Stéphanie Obis, responsable de la mission handicap chez Altran dans la région parisienne et le Nord.

Aujourd'hui, 17 sociétés sont membres de Cancer@Work. Toutes ont signé une charte et s'engagent ainsi à faire évoluer les savoirs et les représentations liées au cancer en entreprise, à accompagner la création d'un environnement favorable aux personnes touchées par un cancer et à favoriser des comportements et pratiques managériales qui respectent l'application du principe de non-discrimination ainsi que l'insertion et le développement professionnel des candidats et salariés touchés par la maladie.

Objectif : mobiliser de plus en plus d'entreprises et de salariés

En 2017, Cancer@Work entend continuer à mobiliser de plus en plus de dirigeants et d'entreprises et d'ici à 2018, elle s'est fixé un objectif d'un million de salariés sensibilisés. Cela passe notamment par l'organisation d'événements visant à partager les bonnes pratiques. Le job dating organisé demain, jeudi 30 mars, à Bordeaux en est un. La matinée sera consacrée à différents ateliers de préparation à la recherche d'emploi et aux entretiens. L'après-midi "speed meeting" permettra à 12 candidats d'échanger avec des DRH membres de Cancer@work.

"Les entreprises ne viennent pas avec des postes à proposer. C'est davantage un moment d'échange et de conseil de la part de décideurs d'entreprises. Ce job dating est une préparation physique et mentale à la reprise d'activité, l'idée étant de faire émerger les qualités et compétences acquises avec la maladie. Je suis convaincue que de la même manière que la maladie peut rendre une personne plus forte, elle peut rendre une entreprise plus performante. J'ai en tête cette phrase d'une collègue évoquant ce que la maladie avait apporté à leur équipe : c'est le meilleur séminaire de team building que je n'ai jamais vécu", relate Anne-Sophie Tuszynski.

Une équation économiquement gagnante

"Concilier cancer et emploi est une équation économiquement gagnante", ajoute Anne-Sophie Tuszynski. Preuve à l'appui : cette étude récemment réalisée par l'économiste Nicolas Bouzou.

"Mieux intégrer la maladie est financièrement gagnant pour le salarié comme pour l'entreprise. Pour les entreprises, cela représente entre 74 et 491 millions d'euros par an d'économie potentielle de coût lié à l'arrêt de travail, générée par le maintien dans l'emploi des personnes nouvellement diagnostiquées et en mesure de travailler. A ce sujet, 77 % des actifs estiment que le maintien dans l'emploi renforce la cohésion et l'engagement des équipes. Enfin, l'étude souligne que le maintien dans l'emploi réduit les coûts directs et indirects pour la société avec 147 à 283 millions d'euros par an d'économies sur le versement des indemnités journalières de l'assurance maladie."

Entre des actions de sensibilisation sur les maladies chroniques et sur le handicap invisible, la formation des ressources humaines et des managers, un accompagnement individuel ou collectif, ou encore l'intégration dans les rapports RSE (responsabilité sociétale des entreprises), Cancer@work constate que les premiers plans d'action se déploient en entreprise. Son baromètre 2016  révèle d'ailleurs que le cancer est de moins en moins tabou en entreprise et que la parole se libère. "55 % des personnes interrogées estiment qu'il est difficile de parler de cancer au travail contre 77 % en 2013", insiste Anne-Sophie Tuszynski.

Cancer et travail : un sujet de stratégie d'entreprise

Altran, une des premières entreprises à avoir adhéré à l'association, intègre la maladie dans sa stratégie d'entreprise depuis 2009.

"La maladie entraîne beaucoup de fatigue donc nous essayons d'aménager les postes pour que les compétences puissent s'exprimer au mieux. Cela implique parfois une adaptation du temps de travail, des changements d'horaires, un changement de siège plus ergonomique aussi tout simplement. Je suis tentée de dire que cela fait presque partie du soin. Nous avons des outils profitons-en. Cela permet à la personne de moins se concentrer sur la maladie. Parallèlement, cela apporte de la cohésion au sein de l'équipe", explique Stéphanie Obis chez Altran.

Altran s'engage également sur du mécénat de compétence pour accompagner Cancer@Work notamment dans le domaine du développement informatique. "On continue un partenariat qui nous tient à cœur", souligne Stéphanie Obis.

Au-delà de la sensibilisation des entreprises, Cancer@Work a lancé à destination des personnes touchées par la maladie Allo Alex, un numéro gratuit (0 800 400 310) pour poser des questions sur le cancer au travail et un site internet, alloalex.com. Ce sont tous les acteurs concernés que Cancer@Work veut sensibiliser.

"C'est en mobilisant les dirigeants, les managers et les salariés, que nous réussirons, ensemble, à aligner protection et projection professionnelle des personnes avec les impératifs de performances économiques et sociales des entreprises", conclut Anne-Sophie Tuszynski.

Le Plan Cancer 2014-2019 s'est fixé pour objectif, d'ici à 2020, d'augmenter de 50 % les chances de retour à l'emploi deux ans après le diagnostic des personnes atteintes d'un cancer.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 30/03/2017 à 10:06
Signaler
Au sein d'une société néolibérale dans laquelle seul l'individualisme et la compétitivité sont imposés cela ne peut faire que du bien à tous les protagonistes, aussi bien les malades que leurs entourages professionnels. S'ouvrir aux autres c'est ...

à écrit le 29/03/2017 à 15:04
Signaler
"Le Plan Cancer 2014-2019 s'est fixé pour objectif, d'ici à 2020, d'augmenter de 50 % les chances de retour à l'emploi deux ans après le diagnostic des personnes atteintes d'un cancer" Attention aux chiffres car un retour au travail dans un placard ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.