Méthanisation : l'étude qui révèle le gisement aquitain

Présentée ce matin, l’étude sur le “gisement et potentiel de développement de la méthanisation en Aquitaine”, commandée et financée par le Conseil régional d’Aquitaine, permet de clarifier le potentiel énergétique local. A l’échéance 2030, l’Aquitaine, qui est à ce jour la première région de France en puissance installée en méthanisation, devrait produire ainsi 11 % de sa consommation de gaz naturel.
Photo aérienne de l'unité de méthanisation Méthalandes réalisée par la société Eneria

Après avoir mis en place (en 2011), en partenariat avec l'Ademe, "Méthaqtion", dispositif d'accompagnement visant à structurer le développement de la filière méthanisation, la Région a financé pour 55.728 € une étude qui a permis entre octobre 2014 et aujourd'hui au groupement Solagro, Indiggo, l'Apesa et Ectare d'évaluer le potentiel de développement de celle-ci.
Il apparaît, à l'issue de cette étude, restituée ce matin en présence d'Alain Rousset, président de la Région, que le potentiel équivalent énergétique de la méthanisation, via la ressource organique recensée, est à ce point important qu'il pourrait assurer, à l'horizon 2030, 11 % de la consommation de gaz naturel de la région.

Les déjections animales : plus important gisement énergétique identifié

Un "gisement" mobilisable évalué à 4,3 millions de tonnes brutes par an, pour un potentiel équivalent énergétique de 1.600 GWh (Giga Watt heure) qui est très majoritairement (à 71 %) issu des déjections d'élevage (lisiers et fumiers). Avec les sous-produits des cultures céréalières, maraîchères et viticoles...  le secteur agricole totalise 91 % du potentiel régional identifié. Les déchets de la restauration, agro-industriel, déchets verts ou boues d'épuration représentent, potentiellement, les 9 % du potentiel énergétique restant.
Aujourd'hui, la région qui est, selon l'Ademe, la première de France en termes de puissance installée dans le domaine de la méthanisation, compte 13 unités de production en fonctionnement. 37 installations sont en cours d'étude.
"Notre potentiel est énorme, mais quand on voit qu'en Allemagne on compte 8.000 unités de méthanisation quand la France en compte entre 150 et 200, on comprend vite que nos délais d'instruction des dossiers sont beaucoup longs", expliquait ce matin Alain Rousset.
Les moyennes lui donnent raison. En Allemagne, il fait deux ans en moyenne pour passer du projet au lancement de la production. Il en faut cinq en France...

"Nous abandonnons l'éolien, nous parions sur la méthanisation"

Des délais qui n'effraient pas Eneria, filiale énergie du groupe Monnoyeur (siège à Saint-Denis, groupe originaire du sud-Ouest. 1,5 Md€ de CA annuel). Il faut dire qu'en matière de délais, Eneria a déjà été servie. Jusque-là présente sur le marché de l'énergie éolienne, la société Eneria (600 salariés, 250 M€ de CA) réoriente ses investissements. Exit l'éolien, la méthanisation est la priorité. "Il est impossible, en France, de passer aux travers de recours dès que l'on présente un projet de parc éolien", assure Pierre Dispan de Floran, ingénieur développement d'Eneria. "Dans l'Aveyron, par exemple, nous avons initié un projet éolien en 2002... il n'est toujours pas construit à ce jour."
Il en aura fallu cinq pour faire sortir de terre Méthalandes investissement à 25 M€ porté par Monnoyeur - Eneria et la CdC. L'unité, la plus grande usine de méthanisation de France, qui vient de démarrer (22 avril) pourra, rapidement, produire 37 millions de Kwh soit la consommation électrique de 32.000 habitants à partir de la méthanisation de 136.000 tonnes d'effluents agricoles récupérés dans un rayon de 25 km autour de l'usine. "Le retour sur investissement est calculé à 13 ans. Pour les éleveurs et agriculteurs qui nous fournissent la ressource organique, notre activité est une vraie source d'économies. Ils n'ont pas à investir en capacité de stockage et de traitement de leurs effluents, surtout dans un contexte de zones vulnérables qui durcit les règles. Par ailleurs, l'engrais qui résulte de la méthanisation de leurs effluents est revendu pour partie par Terrial aux agriculteurs fournisseurs, à tarif préférentiel", souligne Pierre Dispan de Floran.

Méthanisation : les premiers recours de riverains ?

Un avantage qui n'a pas échappé à beaucoup des potentiels fournisseurs qui sont situés à proximité de Méthalandes. Eneria fait état d'une liste d'attente de fournisseurs potentiel de lisier ou fumier de 20.000 tonnes supplémentaires.
A l'instar de ce que montre l'étude présentée ce matin et au regard du nombre de dossiers recensés par Méthaqtion, le gisement nécessaire au développement de la méthanisation en Aquitaine ne semble pas prêt de se tarir. D'importants dossiers sont actuellement en cours de finalisation, à l'image de Biovilleneuvois, projet à 11,5 M€ porté par Fonroche Biogaz. Et, pour le moment, les délais d'instruction des dossiers  ne refroidissent pas les investisseurs. Pour l'instant seulement ? "Notre projet de station collective de méthanisation de Vic-Montaner, en Pyrénées-Atlantiques, un projet à 25 M€ lui aussi, comme celui de Méthalandes, a obtenu l'autorisation d'ouverture depuis deux ans, mais il y a deux mois que nous sommes confrontés à un recours de riverains", reconnaît Pierre Dispan de Floran.
La méthanisation, dans sa capacité à s'appuyer sur une ressource organique territoriale abondante (déjection d'élevage, sous-produits de cultures céréalières, maraichères, viticoles...) dans sa capacité à produire du gaz injectable dans les réseaux gaz existants, ou de l'électricité et de la chaleur via la cogénération, a certes un beau potentiel en Aquitaine où 134 projets pourraient voir le jours dans les années qui viennent.
Mais pour tenir l'objectif, à savoir produire, d'ici à 2030, 1.600 GWh d'énergie par an via la méthanisation,  il faudra, en rythme d'ouvertures, tenir la cadence voire les délais et donc éviter les doutes ou interrogations des riverains potentiels de ces futures unités de méthanisation. Faut-il craindre la répétition de l'"expérience éolienne" ?

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Commentaires 3
à écrit le 19/05/2015 à 13:44
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Genial !! seule grosse interrogation : pourquoi soustraire à la terre son humus (déchets verts et boues) ??? toute solution pour être durable et soutenable doit tenir compte du sol et répondre à ses besoins sinon nous allons faire forcement fausse ro...

à écrit le 19/05/2015 à 11:07
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Et pourquoi ne pas coupler des centrales de méthanisation aux élevages bovins? Plutôt que d’extraire celui qui est enfermé dans la terre et produire augmenter la température et l'effet de serre, ne serait i pas plus logique de ce servir de celui qu'o...

le 19/05/2015 à 14:05
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Ces choix ne résultent-il pas des effets pervers propres à toute subvention créant un marché artificiel?

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