Bordeaux 2014 : primeurs, prix, pression

Angélique de Lencquesaing est DG déléguée d’Idealwine.com (360.000 abonnés, 150.000 utilisateurs actifs). Via ce site d’enchères en ligne de grands crus anciens, mais aussi de ventes à prix fixe de vins du monde plus récents, elle a, de fait, une vision précise de l’évolution des prix des grands crus et de l’attente des acheteurs. Selon elle, les prix qui seront annoncés à la suite de la campagne des primeurs seront au centre des attentions du monde économique du vin. Pour elle encore, la fixation de ces prix s’annonce comme un moment ultradélicat de la stratégie économique des grands crus en particulier, et de toute la production bordelaise en général.
DG déléguée d'iDealwine, Angélique de Lencquesaing estime que les taux de change actuels pourraient permettre aux châteaux de maintenir les prix de vente en primeur des vins tout en permettant aux acheteurs en dollar de réaliser de bonnes affaires

La semaine prochaine, Angélique de Lencquesaing, codirigeante du site Idealwine.com, le site d'enchères et de ventes de vins en ligne, créé en 2000 à Paris par trois spécialistes, comme elle, du marché boursier, sera à Bordeaux pour déguster des Bordeaux 2014 lors de la semaine des primeurs qui démarre le 31 mars (jusqu'au 5 avril).
Des vins qui, un jour, seront peut-être parmi les valeurs sûres que les amateurs du monde entier tenteront de décrocher aux enchères sur son site qui est spécialisé dans les ventes de millésimes anciens de grands crus.
"Nous viendrons donc surtout prendre le pouls de ce millésime, mais aussi celui des différents intervenants, propriétaires, dégustateurs, acheteurs... Cette année de primeurs va être délicate pour eux."

Pression anglo-saxonne sur les prix

Délicate selon cette spécialiste parce que si, comme on le pressent, et comme certains propriétaires l'annoncent bruyamment, le 2014 est une année de référence qualitative, cette bonne nouvelle, qui vient après trois années difficiles, va compliquer la tâche des propriétaires au moment de fixer leurs prix de vente en primeur.

"Pour les propriétaires, l'exercice s'annonce vraiment difficile", avoue Angélique de Lencquesaing, dont le site réalise 60 % des volumes de ventes (aux enchères ou à prix fixes) avec des bordeaux. "Il y a une grosse attente, voire une très grosse pression sur des prix à la baisse, par rapport aux années précédentes. Une pression qui est notamment venue d'un marché historique pour les bordeaux, le négoce anglo-saxon, qui demande ni plus ni moins un retour à des tarifs de 2008 !"
Une demande qui n'est peut-être pas réaliste, mais qui témoigne de l'âpreté de la bataille commerciale qui s'engage entre négoce et production.

Une baisse "meurtrière" pour les années précédentes en stock

"Ce n'est pas réaliste, et c'est surtout dangereux. Sur une année, comme le 2014, qui s'annonce de bonne facture, une baisse radicale serait un mauvais signal envoyé aux acheteurs. Ce serait avouer que les prix étaient anormalement élevés pour les millésimes précédents, moins qualitatifs. Ce serait aussi, pour les châteaux et les négociants qui ont du stock, la mort commerciale de ces années 2011, 2012 et 2013 qui n'auraient plus aucun intérêt pour le marché."

Reste que la campagne des primeurs permet avant tout aux châteaux de confronter le millésime "en construction" (les vins ne seront achevés et livrables après élevage que dans dix mois) aux acheteurs, à la presse spécialisée et aux critiques. Si de très bonnes notes récompensent un beau millésime, les acheteurs seront sans doute plus enclins à sortir le carnet de chèques sans trop discuter.

Sauvés par le change ?

Pour cela, il faudra que les dégustations soient à la hauteur de la promesse bordelaise.

"Même si Robert Parker ne sera pas là, son collaborateur Neil Martin goûtera les vins pour The Wine Advocate. Les dégustateurs et journalistes vont établir leur hiérarchie. Si un consensus se dégage autour de certains domaines, alors les bonne notes obtenues feront oublier, au moins en partie, la problématique du prix à mon sens. Au-delà de l'annonce de ces prix, il sera d'ailleurs intéressant de voir comment la communication venue des châteaux va s'organiser autour de la qualité de ce millésime."

Hausse, baisse, tous les scenarii sont possibles... y compris le statu quo.
Angélique de Lencquesaing analyse en effet la baisse du taux de change entre euro et dollar comme une chance "exogène" dont pourraient bénéficier les grands crus de Bordeaux.

"La situation actuelle permet, pour un acheteur en dollar, de dépenser moins pour un vin vendu au même prix qu'en 2013 en euros. Je ne serais donc pas surprise de voir, sous l'effet des devises, des prix étales, voire en légère hausse pour les vins les plus réussis par rapport à 2013."

Finalement, le taux de change, favorable aux exportations françaises, va peut-être jouer le rôle d'un arbitre qui va soulager les châteaux de jolis maux de têtes...


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